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Concessions syndicales: des emplois épargnés, mais une salle de rédaction ébranlée à Halifax

Bonnes, moins bonnes et trÈs mauvaises nouvelles au Chronicle Herald

Grâce aux concessions accordées par les syndiqués du quotidien Chronicle Herald à Halifax, ce qui au départ devait résulter en la mise à pied de vingt employés n’aura finalement mené qu’au départ forcé de deux d’entre eux.

Toutefois, l’abolition de dix-sept emplois – soit environ le quart de la salle de rédaction – aura un impact considérable sur la capacité de livrer un quotidien de qualité, tout en augmentant la charge de travail des journalistes qui demeurent en poste.

Samedi dernier, les membres du Halifax Typographical Union (HTU) ont voté en faveur de trois concessions permettant de sauvegarder l’emploi de trois de leurs collègues dont le nom figurait sur la liste originale des mises à pied prévues.

Le vote, qui vient modifier la convention collective, a eu pour résultat de hausser de 1,3 pour cent les contributions des employés au régime de retraite, de réduire le taux de kilométrage lors des déplacements par véhicule automobile, et d’exiger des membres que ceux-ci prennent une semaine de congé non rémunérée.

Ces concessions, auxquelles s’ajoutent treize employés ayant préféré un rachat ou une retraite anticipée ainsi que le départ de deux employés non syndiqués, ont eu pour effet de limiter à deux le nombre de mises à pied.

La présidente du HTU Ingrid Bulmer a indiqué qu’il ne s’agissait pas ici que de sauver des emplois. « Il s’agit aussi de sauver le journalisme », a-t-elle dit, ajoutant que « la véritable bataille reste à venir, la convention collective venant à échéance dans environ un an ».

Malgré des clauses dans la convention précisant que le HTU a compétence sur les emplois à la salle de rédaction, l’entreprise n’a pas caché son intention de confier en sous-traitance la majorité du travail actuellement accompli par les réviseurs.



« Le Chronicle Herald a toujours été un modèle de journalisme local indépendant de grande qualité, et il est regrettable de voir une telle tradition d’excellence menacée par des coupes dévastatrices, a déploré Martin O’Hanlon, président de SCA Canada. Il est dans l’intérêt de tous d’assurer le maintien d’une salle de rédaction solide et dynamique. Nous aurions préféré que l’entreprise envisage d’autres alternatives afin de réduire les coûts avant de procéder à des mises à pied aussi brutales. »

O’Hanlon a dit être fier de la façon dont les membres du local de Halifax, qui représente environ une centaine d’employés des départements de la rédaction, de la composition et de l’impression, ont rapidement fait front commun et sont demeurés solidaires lorsque les mises à pied ont été annoncées à la fin du mois d’octobre. « Au moins, nos membres savent se défendre lorsque le journalisme ou des emplois locaux de qualité sont menacés, a-t-il souligné. Les employés non syndiqués sont entièrement à la merci de propriétaires sans scrupules qui n’hésitent pas à anéantir des emplois à leur guise. »

Les membres du HTU ont entamé une grève de signature le 3 novembre dernier. Trois jours plus tard, ces derniers ont participé à un piquet de grève informatif d’une quinzaine de minutes à l’extérieur des bureaux du quotidien. Le lendemain, ils ont lancé une pétition en ligne sur le site change.org, pétition qui allait éventuellement récolter quelque 560 signatures. Le tout fut suivi d’une page Facebook intitulée Friends of the Chronicle Herald Newsroom, sur laquelle on retrouve une foule de discussions et échanges animés sur le journalisme local, récipiendaire de nombreux prix. Cette page a permis au HTU d’échanger avec les lecteurs du quotidien.

L’annonce initiale des mises à pied a soulevé un tollé dans les provinces maritimes, là où l’on accorde une grande importance au talent local et où l’excellence est très valorisée. Ainsi, des articles ont été publiés dans divers médias tels que The Coast, dans lesquels on déplorait les coupes impitoyables imposées au secteur journalistique.

Stephen Kimber, professeur en journalisme à la University of King’s College, a dit à la Halifax Media Co-op être conscient que le quotidien doit affronter de sérieuses difficultés financières, ajoutant toutefois que les mises à pied ne sont pas la solution au problème.

« Il s’agit en fait d’un cercle vicieux, explique-t-il. Vous vous débarrassez de vos meilleurs journalistes, ces jeunes bourrés de talent qui apportent au quotidien une belle énergie et des points de vue différents. Or, plus vous les laissez partir, moins vous devenez pertinent. »